Une recherche vaine ?

Rechercher la vérité pour se prémunir de l'erreur, des effets de l'ignorance ou des illusions du vraisemblable ne pourrait-il finalement pas, paradoxalement, conduire inexorablement à devoir y renoncer ?

En effet, présupposer une raison (pourquoi ?) ou un but (pour quoi ?) à la volonté de vérité, qu'il s'agirait d'identifier, revient à en faire le moyen délibéré de quelque chose qu'on lui considèrerait comme supérieur et qui constituerait la fin véritable de notre quête.

On pourrait alors se demander quelle consistance a la vérité, si elle n'est recherchée que comme moyen d'obtenir autre chose, et si l'on ne peut pas au contraire la vouloir pour elle-même.

Par ailleurs, dans les entreprises où la vérité est l'objet d'une quête - que ce soit dans l'enquête, devant un tribunal, ou dans la démarche heuristique des sciences -, celle-ci est présupposée existante et accessible, avant que d'être atteinte. Pour autant, quelles que soient les méthodes mises en œuvre, comment s'assurer que ce que trouve le chercheur est bien "la vérité" ? Existe-t-il des critères du vrai, qui nous permettraient infailliblement et en toutes circonstances de le reconnaître sans même l'avoir connu auparavant ? Le fait de chercher ne nous condamne-t-il pas à une perpétuelle inquiétude : à quoi bon alors vouloir la vérité, quand on pourrait plutôt vouloir la quiétude ?

Toute la difficulté vient peut-être, finalement, de ce que l'on identifie l'objet d'une quête (la vérité) avant même de savoir ce qu'il est, puisque c'est justement parce qu'on ne le sait pas que l'on cherche à savoir : on ne veut précisément pas trouver la vérité comme on voudrait retrouver ses clés, que l'on aurait égarées.